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03 juillet 2014

L'équipe

L'écrivain et homme d'affaire franco-russe Michel Ohl a dû déployer tous ses talents de fin entremetteur, œuvrant à travers ses réseaux, pour organiser en "off" de la Coupe du Monde, au Jabiru-Surterrain, à Liposthey, une rencontre que l'on veut mémorable entre la France et la Russie.
Le match sera retransmis pour quelques happy few, lors de l'émission RadioFoot sur France Bleu Gascogne qui a racheté les droits en exclusivité..


Note à benêts : M.-A.-F.-S.-F.-E.  : Morts-Auteurs-Fin-de-Siècle-Français-Entente
                               R.-E.-M.-C. : Russie-Ecrivains-Morts-Club
                               Michel Ohl, Chez le libraire

RadioFoot : Que pensez-vous de cette idée d'Ohl d'aligner 15 joueurs au lieu de 11, cela n’empiète-t-il pas sur les règles d'un jeu voisin ?.
Pierre Cocoménès : Rien n'est fermé, rajouter 4 joueurs peut redonner du peps à un jeu qui manque parfois de tonus et puis Ohl est un visionnaire, il peut ouvrir de nouveaux champs à notre sport.
RadioFoot : Quid de l'équipe présentée ?
Pierre Cocoménès : Un dispositif très classique en 3.2.3.2.4.1. Hugo a fait confiance à la jeunesse en choisissant Poictevin dont ce sera la première sélection. Verlaine, qui rentre de blessure, a retrouvé sa place mais son genou tiendra-t-il ? Des valeurs sures à l'avant avec Ben Zola, le plus capé des attaquants, Mendés et Huysmans, très affûtés en cette fin de saison. Lautréamont, on peut le regretter, restera sur le banc de touche suite à sa prestation en demi-teinte contre l'équipe de la Sainte-Alliance.
RadioFoot : Et l'équipe russe ?
Pierre Cocoménès : Une grosse surprise en attaque : Derjavine fait sans doute un pari très audacieux avec l'excellent défenseur Gontcharov qu'il propulse avant-centre malgré son manque d'expérience. La paire Tolstoï, Dostoïevski sera redoutable en milieu de terrain, n'en doutons pas. Pouchkine est à nouveau titulaire, il le mérite, il a été très tranchant en dernier lieu dans les caisses contre les Prussiens.
RadioFoot : Un mot sur l'arbitrage ? n'y a-t-il pas un risque d'impartialité,  le sort ayant désigné un français ?
Pierre Cocoménès :  Il n'y a pas grand chose à craindre, De Vogüé a une longue habitude de ce type de match. Il est connu pour ses qualités de diplomate.
RadioFoot : Merci Pierre.
Pierre Cocoménès : Merci à vous.


Document préparatoire du directeur sportif A. Breton.

A noter que quelques étrangers en cours de naturalisation, Leibnitz, qui joue au Bayern, Arétin de la Lazio Roma, Apulée du CS Constantine... sont intégrés dans les possibles...

08 novembre 2010

L'Angélus

Versicule : Angelus Domini nuntiavit Mariæ
Répons : Et concepit de Spiritu Sancto.


Explication "Paranoïa-Critique" de l'Angélus de Millet.

La paranoïa ne se borne pas toujours à être de l'"illustration": elle constitue encore la véritable et unique "illustration littérale" connue, c'est-à-dire l'"illustration interprétative délirante" - l'"identité" se manifestant toujours à posteriori comme facteur conséquent de l'"association interprétative".
Aucune image ne me paraît capable d'illustrer plus "littéralement", d'une façon plus délirante, Lautréamont et Les Chants de Maldoror en particulier, que celle qui fut exécutée il y a soixante-dix ans environ par le peintre des tragi­ques atavismes cannibales, des ancestrales et terrifiantes rencontres de viandes douces, molles et de bonne qualité: je fais allusion à J.-F. Millet, ce peintre incommensurablement incompris. C'est précisément le mille fois fameux Angélus de Millet qui, selon moi, équivaudrait dans la peinture à la bien connue et sublime "rencontre fortuite, sur une table de dissection, d'une machine à coudre et d'un parapluie". Rien ne me paraît, en effet, pouvoir illustrer, aussi littéralement, d'une façon aussi atroce et hyperévidente, cette rencontre que l'image obsédante de l'Angélus. L'Angélus est à ma connaissance l'unique tableau au monde qui com­porte la présence immobile, la rencontre expectante de deux êtres dans un milieu solitaire, crépusculaire et mortel. Ce milieu solitaire, crépusculaire et mortel joue, dans le tableau, le rôle de la table de dissection dans le texte poétique car non seulement la vie s'éteint à l'horizon, mais encore, la fourche plonge dans cette réelle et substantielle viande qu'a été, de tous temps, pour l'homme la terre labourée; elle s'y enfonce, dis-je, avec cette intentionnalité gourmande de fécon­dité, propre aux incisions délectables du bistouri qui, comme chacun sait, ne fait que chercher secrètement, sous divers rétextes analytiques, dans la dissection de tout cadavre, la synthétique, féconde et nourrissante pomme de terre de la mort; d'où ce constant dualisme, ressenti à
travers toutes les époques, de terre labourée-nourriture, table à manger, terre labourée se nourrissant de ce fumier doux comme le miel qui n'est autre que celui des authentiques et ammoniacaux désirs nécrophiliques-dualisme qui nous conduit finalement à considérer la terre labourée, surtout si elle s'aggrave du crépuscule, comme la table de dissection la mieux servie, celle entre toutes qui nous offre le cadavre le plus garanti et appétissant condimenté de cette truffe fine et impondérable qui ne se trouve que dans les fèves nutritifs constitués par la viande des épaules ramollies des nourrices hitlériennes et ataviques, et de ce sel incorruptible et excitant, fait du grouil­lement frénétique et vorace des fourmis, que doit comporter toute authentique "putréfaction insépulte" qui se respecte et peut passer pour digne de ce nom. Si, comme nous le prétendons, la "terre labourée" est la plus littérale et la plus avantageuse de toutes les tables de dissection connues, le parapluie et la machine à coudre seraient transposés dans l'Angélus, en figure masculine et figure féminine, et tout le malaise, toute l'énigme de la rencontre proviendrait toujours selon ma très modeste opinion, indépendamment de l'énigme et du malaise que nous savons maintenant être déterminés par le lieu (terre labourée, table de dissection), des particularités authentiques contenues dans les deux personnages, dans deux objets, d'où dérive tout le développement argumental, toute la tragédie laten­te de la rencontre expectante et préliminaire.
Le parapluie - type d'objet surréaliste à fonctionnement symbolique - par suite de son flagrant et bien connu phénomène d'érection, ne serait autre que la figure masculine de l'Angélus qui, comme on me fera le plaisir de bien vouloir se le rappeler, dans le tableau cherche à dissimuler - sans parvenir à autre chose qu'à le mettre en évidence - son état d'érection par la position honteuse et compromettante de son propre chapeau. En face de lui, la machine à coudre, sym­bole féminin connu de tous, extrêmement caractérisera jusqu'à se réclamer de la vertu mortelle et cannibale de son aiguille de piquage, dont le travail s'identifie à cette perforation superfine de la mante religieuse "vidant" son mâle, c'est-à-dire vidant son parapluie, le transformant en cette victime marty­risée, flasque et dépressive que devient tout parapluie fermé après la magnificence de son fonctionnement amoureux, paroxistique et tendu de tout à l'heure.
Il est certain que, derrière ces deux figures tendues de l'Angélus, c'est-à-dire derrière la machine à coudre et la parapluie, les glaneuses ne peuvent que continuer à ramasser avec indifférence, conventionnellement, les oeufs sur le plat (sans plat), les encriers, les cuillers, et toute l'argenterie que ces dernières heures de crépuscule rendent à cette heure étincelante exhibitionniste et à pei­ne une côtelette crue, prise comme échantillon moyen des signes comestibles, a-t-elle été posée sur la tête du mâle, que déjà la silhouette de Napoléon, l'"affamé" se forme et se dessine subitement dans les nuages à l'horizon, que déjà on le voit s'approcher impatient à la tête de sa cavalcade pour venir chercher la côtelette en question, laquelle, en réalité, de vérité, n'est destinée à proprement parler qu'à l'aiguille, fine de toute finesse, terrifiante de toute terreur, belle de tou­te beauté, de la machine à coudre spectrale, clandestine et bien portante.
L'Angélus de Millet beau comme la rencontre fortuite, sur une table de dissection, d'une machine à coudre et d'un parapluie.

 Salvador Dali.


Salvador Dali - Réminiscence archéologique de l'Angélus de Millet.

12 décembre 2011

Rêve

Emblème : Étoile noire


Oscar Dominguez
As de Rêve. Étoile

♫ Comme les Rois Mages en Galilée
 Suivaient des yeux l'étoile du Berger
 Je te suivrai, où tu iras j'irai.
(oui mais reste derrière!)
Sheila



 Lautréamont. Génie de Rêve. Étoile.

Arithmétique ! algèbre ! géométrie !
 trinité grandiose ! triangle lumineux !
Celui qui ne vous a pas connus est un insensé !
 Isidore Ducasse
 (calme-toi Isidore!)



Wifredo Lam
 Alice. Sirène de Rêve. Étoile.

(♫ Alice qui pisse dans un ruisseau
Un homme qui passe lui voit l'oiseau!)


Oscar Dominguez
 Freud. Mage de Rêve. Étoile. 

♫ Qu’est-ce qu’il fait, qu’est-ce qu’il a, qui c’est celui-là?
Complètement toqué, ce mec-là, complètement gaga
Il a une drôle de tête ce type-là
Pierre Vassiliu

23 avril 2019

Les bons conseils de l'oncle Isidore

Isidore Ducasse
Comte de Lautréamont
par Félix Vallotton
Cet enfant, qui est assis sur un banc du jardin des Tuileries, comme il est gentil ! Ses yeux hardis dardent quelque objet invisible, au loin, dans l’espace. Il ne doit pas avoir plus de huit ans, et, cependant, il ne s’amuse pas, comme il serait convenable. Tout au moins il devrait rire et se promener avec quelque camarade, au lieu de rester seul ; mais, ce n’est pas son caractère.

Cet enfant, qui est assis sur un banc du jardin des Tuileries, comme il est gentil ! Un homme, mû par un dessein caché, vient s’asseoir à côté de lui, sur le même banc, avec des allures équivoques. Qui est-ce ? Je n’ai pas besoin de vous le dire ; car, vous le reconnaîtrez à sa conversation tortueuse. Écoutons-les, ne les dérangeons pas :

– À quoi pensais-tu, enfant ?

– Je pensais au ciel.

– Il n’est pas nécessaire que tu penses au ciel ; c’est déjà assez de penser à la terre. Es-tu fatigué de vivre, toi qui viens à peine de naître ?

– Non, mais chacun préfère le ciel à la terre.

– Eh bien, pas moi. Car, puisque le ciel a été fait par Dieu, ainsi que la terre, sois sûr que tu y rencontreras les mêmes maux qu’ici-bas. Après ta mort, tu ne seras pas récompensé d’après tes mérites ; car, si l’on te commet des injustices sur cette terre (comme tu l’éprouveras, par expérience, plus tard), il n’y a pas de raison pour que, dans l’autre vie, on ne t’en commette non plus. Ce que tu as de mieux à faire, c’est de ne pas penser à Dieu, et de te faire justice toi-même, puisqu’on te la refuse. Si un de tes camarades t’offensait, est-ce que tu ne serais pas heureux de le tuer ?

– Mais, c’est défendu.

– Ce n’est pas si défendu que tu crois. Il s’agit seulement de ne pas se laisser attraper. La justice qu’apportent les lois ne vaut rien ; c’est la jurisprudence de l’offensé qui compte. Si tu détestais un de tes camarades, est-ce que tu ne serais pas malheureux de songer qu’à chaque instant tu aies sa pensée devant tes yeux ?

– C’est vrai.

– Voilà donc un de tes camarades qui te rendrait malheureux toute ta vie ; car, voyant que ta haine n’est que passive, il ne continuera pas moins de se narguer de toi, et de te causer du mal impunément. Il n’y a donc qu’un moyen de faire cesser la situation ; c’est de se débarrasser de son ennemi. Voilà où je voulais en venir, pour te faire comprendre sur quelles bases est fondée la société actuelle. Chacun doit se faire justice lui-même, sinon il n’est qu’un imbécile. Celui qui remporte la victoire sur ses semblables, celui-là est le plus rusé et le plus fort. Est-ce que tu ne voudrais pas un jour dominer tes semblables ?

– Oui, oui.

– Sois donc le plus fort et le plus rusé. Tu es encore trop jeune pour être le plus fort ; mais, dès aujourd’hui, tu peux employer la ruse, le plus bel instrument des hommes de génie. Lorsque le berger David atteignait au front le géant Goliath d’une pierre lancée par la fronde, est-ce qu’il n’est pas admirable de remarquer que c’est seulement par la ruse que David a vaincu son adversaire, et que si, au contraire, ils s’étaient pris à bras-le-corps, le géant l’aurait écrasé comme une mouche ? Il en est de même pour toi. À guerre ouverte, tu ne pourras jamais vaincre les hommes, sur lesquels tu es désireux d’étendre ta volonté ; mais, avec la ruse, tu pourras lutter seul contre tous. Tu désires les richesses, les beaux palais et la gloire ? ou m’as-tu trompé quand tu m’as affirmé ces nobles prétentions ?

– Non, non, je ne vous trompais pas. Mais, je voudrais acquérir ce que je désire par d’autres moyens.

– Alors, tu n’acquerras rien du tout. Les moyens vertueux et bonasses ne mènent à rien. Il faut mettre à l’œuvre des leviers plus énergiques et des trames plus savantes. Avant que tu deviennes célèbre par ta vertu et que tu atteignes le but, cent autres auront le temps de faire des cabrioles par-dessus ton dos, et d’arriver au bout de la carrière avant toi, de telle manière qu’il ne s’y trouvera plus de place pour tes idées étroites. Il faut savoir embrasser, avec plus de grandeur, l’horizon du temps présent. N’as-tu jamais entendu parler, par exemple, de la gloire immense qu’apportent les victoires ? Et, cependant, les victoires ne se font pas seules. Il faut verser du sang, beaucoup de sang, pour les engendrer et les déposer aux pieds des conquérants. Sans les cadavres et les membres épars que tu aperçois dans la plaine, où s’est opéré sagement le carnage, il n’y aurait pas de guerre, et, sans guerre, il n’y aurait pas de victoire. Tu vois que, lorsqu’on veut devenir célèbre, il faut se plonger avec grâce dans des fleuves de sang, alimentés par de la chair à canon. Le but excuse le moyen. La première chose, pour devenir célèbre, est d’avoir de l’argent. Or, comme tu n’en as pas, il faudra assassiner pour en acquérir ; mais, comme tu n’es pas assez fort pour manier le poignard, fais-toi voleur, en attendant que tes membres aient grossi. Et, pour qu’ils grossissent plus vite, je te conseille de faire de la gymnastique deux fois par jour, une heure le matin, une heure le soir. De cette manière, tu pourras essayer le crime, avec un certain succès, dès l’âge de quinze ans, au lieu d’attendre jusqu’à vingt. L’amour de la gloire excuse tout, et peut-être, plus tard, maître de tes semblables, leur feras-tu presque autant de bien que tu leur as fait du mal au commencement !…

Les Chants de Maldoror
Isidore Ducasse

[ Il est bien gentil, tonton Isidore mais parfois, je me demande s' il n'hallucine pas un peu]

14 novembre 2007

L'âne et la figue

C'est ainsi que ce que l'inclination de notre esprit à la farce prend pour un misérable coup d'esprit, n'est, la plupart du temps, dans la pensée de l'auteur, qu'une vérité importante, proclamée avec majesté! Oh! ce philosophe insensé qui éclata de rire, en voyant un âne manger une figue! Je n'invente rien: les livres antiques ont raconté, avec les plus amples détails, ce volontaire et honteux dépouillement de la noblesse humaine. Moi, je ne sais pas rire. Je n'ai jamais pu rire, quoique plusieurs fois j'aie essayé de le faire. C'est très difficile d'apprendre à rire. Ou, plutôt, je crois qu'un sentiment de répugnance à cette monstruosité forme une marque essentielle de mon caractère. Eh bien, j'ai été témoin de quelque chose de plus fort: j'ai vu une figue manger un âne! Et, cependant, je n'ai pas ri; franchement, aucune partie buccale n'a remué. Le besoin de pleurer s'empara de moi si fortement, que mes yeux laissèrent tomber une larme. «Nature! nature! m'écriai-je en sanglotant, l'épervier déchire le moineau, la figue mange l'âne et le ténia dévore l'homme!»

Chants de Maldoror
Livre IV

Isidore Ducasse, Comte de Lautréamont, [pas en vrai] (1846, Montevideo, Uruguay – 1870, Paris) , a fait ses classes au Lycée impérial de Tarbes, puis au lycée Louis-Barthou à Pau.

Léon Bloy, au sujet d'Isidore:
 « Cher grand homme avorté ! Pauvre rastaquouère sublime !»