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11 juin 2025

La coupe mulet

Jean Ribière - Chez le coiffeur - Perpignan - 1952

Mullet : a man's hairstyle in which the hair is cut short at the front and sides and left long at the back. 
Mulet : une coiffure masculine dans laquelle les cheveux sont coupés courts à l'avant et sur les côtés et laissés longs à l'arrière. 
— (Bé alors, non, la photo c'est pas çà ! )

Jean Ribière - Le mulet qui rit - Ariège - 1949
 (c'était pour rire)

11 avril 2025

Gypsy Queen

 
Gypsy Queen

Mais où vont-ils donc ?

en famille,

eh bien ! à la foire du bouc à Killorglin,


sous le regard de King Puck

Photos (pas la dernière) de Inge Morath (1923-2002)

26 mars 2025

Hiérarchie

Quand les mecs (et les meufs) du haut regardent au-dessous,
 ils ne voient que de la merde.


Quand les types (et les loutes) du bas regardent au-dessus,
 ils ne voient que des trous du cul.

25 février 2025

Anchois Ier

Banc d'anchois

Anchois premier :
 Bon, c'est décidé, je prends la direction des opérations !
Anchois second et suivants :
 Et à quel titre, on te demande bien !
Anchois premier :
 Faites pas chier, ça me regarde.
Anchois second et suivants :
― Non, non, on va voter, il n'y a pas de raison. Alors, qui se présente pour diriger les opérations ?
― Moi, moi, moi, moi, moi, moi, moi, moi, moi, moi, moi, moi, moi, moi… ad infinitum...
Anchois premier :
 Sans moi ! allez vous faire mettre, bande de trouducs !

Etourneaux en partance

    Mais qui a décidé de l'envol éclair, soudain et massif :  un étourneau sorti de X (pas twitter mais polytechnique), de l'Ena Institut national du service public, un étourneau grande gueule, un vieille baderne d' étourneau,  un étourneau de la patrouille de France, un étourneau à casquette maga ?
    "Quand va t-on se poser, j'en ai ras le bol de ces conneries d'acrobaties aériennes , j'ai les pattes cassées, rumine en son for intérieur l'étourneau lambda ."

Un vol de grues en V au-dessus d’Arudy

    Le troupeau humain, toujours enclin à suivre quelque führer, petit père des peuples, duce, grand timonier, génie des Carpates,  guide suprême... a longtemps vu bien sûr dans l'oiseau de tête le suroiseau infatigable, omniscient,  qui menait sans défaillance toutes ses masses laborieuses sur des milliers de kilomètres lors des migrations. 
      Or il s'avère que le suroiseau est un oiseau comme tous les autres :
à propos de la migration des grues : « […] les voyageuses s’organisent en escadrilles de vol, caractéristique pour les observateurs. Quand elles passent, elles forment un V ou un W ainsi que d’autres figures variées qui se combinent et évoluent en permanence.
    Quand l’oiseau de pointe est fatigué, nous dit François Dorigny dans : Quand passent les grues cendrées,  il coupe son effort en ralentissant son rythme de vol et un autre individu, près de lui ou plus loin dans la ligne, accélère et prend le relais. Après quelques centaines de mètres, le vol en V, un moment disloqué, est reconstitué. »

Zèbres et gnous

      Mais quel zèbre va dire :
 Ils nous emmerdent, ces gnous, toujours entre nos pattes, bon allez, on boit un dernier coup et on met les voiles. Si on rentre trop tard, on va se faire engueuler. 
    (Hum, ça ne va pas dans le sens indiqué plus haut . Les mammifères font toujours leur intéressant C'est certainement un vieux zèbre dominant mal embouché  qui va donner le signal du départ...)

    Plus sérieusement, instruisons nous sur les comportements collectifs des Animaux 
(dont nous faisons lamentablement  partie) en consultant :
Université Paul Sabatier à Toulouse

18 février 2025

Renard et l’âne (et la dinde)

  Tout lui est égal. Chaque matin, il voiture, d’un petit pas sec et dru de fonctionnaire, le facteur Jacquot qui distribue aux villages les commissions faites en ville, les épices, le pain, la viande de boucherie, quelques journaux, une lettre.  

Cette tournée finie, Jacquot et l’âne travaillent pour leur compte. La voiture sert de charrette. Ils vont ensemble à la vigne, au bois, aux pommes de terre. Ils ramènent tantôt des légumes, tantôt des balais verts, ça ou autre chose, selon le jour.

Vincent van Gogh - Charrette à âne - 1881

Jacquot ne cesse de dire : « Hue ! hue ! » sans motif, comme il ronflerait. Parfois l’âne, à cause d’un chardon qu’il flaire, ou d’une idée qui le prend, ne marche plus. Jacquot lui met un bras autour du cou et pousse. Si l’âne résiste, Jacquot lui mord l’oreille.  

Ils mangent dans les fossés, le maître une croûte et des oignons, la bête ce qu’elle veut.  
Ils ne rentrent qu’à la nuit. Leurs ombres passent avec lenteur d’un arbre à l’autre.  
Subitement, le lac de silence où les choses baignent et dorment déjà, se rompt, bouleversé.
Quelle ménagère tire, à cette heure, par un treuil rouillé et criard, des pleins seaux d’eau de son puits ?  
C’est l’âne qui remonte et jette toute sa voix dehors et brait, jusqu’à extinction, qu’il s’en fiche, qu’il s’en fiche. 

 Jules Renard - Histoires naturelles 1874

édition originale Flammarion de 1896
Jules Renard et Félix Vallotton

LA DINDE
Elle se pavane au milieu de la cour, comme si elle vivait sous l'ancien régime.

Les autres volailles ne font que manger toujours, n'importe quoi. Elle, entre ses repas réguliers, ne se préoccupe que d'avoir bel air. Toutes ses plumes sont empesées et les pointes de ses ailes raient le sol, comme pour tracer la route qu'elle suit: c'est là qu'elle s'avance et non ailleurs.

Elle se rengorge tant qu'elle ne voit jamais ses pattes.

Elle ne doute de personne, et dès que je m'approche, elle s'imagine que je veux lui rendre mes hommages.

Déjà elle glougloute d'orgueil.

— Noble dinde, lui dis-je, si vous étiez une oie, j'écrirais votre éloge, comme le fit Buffon, avec une de vos plumes. Mais vous n'êtes qu'une dinde.

J'ai dû la vexer, car le sang monte à sa tête. Des grappes de colère lui pendent au bec. Elle a une crise de rouge. Elle fait claquer d'un coup sec l'éventail de sa queue et cette vieille chipie me tourne le dos.

Bois de Félix Vallotton

06 janvier 2025

Marque-page

Mes chers amis
Soyez heureux
Pour ennuyer les affreux
les méchants
Tel est mon vœu
de Nouvel An


    Un marque-page du Musée de la Chalosse qui a consacré une exposition d'avril à novembre 2024 à Lise Deharme, muse d'André Breton (le gant du collage sur la  couverture de Nadja, c'est à elle).
    Comme par un fait exprès, cette Lise possédait à Montfort en Chalosse une demeure où elle invitait beaucoup de monde, à l'entrée du chemin (du Pourtiou) qui menait trois cents mètres plus bas à la maison qu'habitait ma grand-mère Rosa. C'est dire qu'avec quelques années en moins, j'aurais pu, jeune cambrousard, tomber nez à nez avec Breton donc, Man ray, Eluard, Cocteau, Queneau, Desnos, Aragon, Picasso, Dali, j'en passe et des meilleur.e.s; j'en suis tout ébaubi.

26 novembre 2024

Koloda Douda

А где ж гуси?
В камыш ушли.
А где ж камыш?
Девки выжали.
А где ж девки?
Девки замуж ушли.
А где ж казаки?
На войну пошли.

Les oies de Meïdoum - stuc peint
Ancien Empire, début IV° dynastie - vers 2620 av. J.-C.
 Mastaba de Nefermaat et de son épouse Atet à Meïdoum

Et où sont les oies ?
Parties dans les joncs.
Et où sont les joncs ?
Les filles les ont coupés.
Et où sont les filles ?
Mariées avec leurs hommes.
Et où sont leurs Cosaques ?
Partis à la guerre.

Une comptine russe qui a inspiré Pete Seeger pour son : 
Where Have All the Flowers Gone? ici par Marlène Dietrich

13 novembre 2024

Le lapin fait aux pattes

Roland Topor -  Le lapin - 1975

 "Le Lapin de Montmartre (Lucien Undreiner) est arrêté. On le soupçonne d’un cambriolage (Asnières) et d’un meurtre (Courbevoie)."

Félix Fénéon - Nouvelles en trois lignes, 1906

Paul Signac - Opus 217.
Sur l'émail d'un fond rythmique de mesures et d'angles, de tons et de teintes,
 Portrait de M. Félix Fénéon en 1890
Moma

09 octobre 2024

On achève bien les chevaux

 Serait-ce une solution ?

   Trottoirs, bords de route, pelouses, bacs à sable, recoins négligés, terrains de sport, sur tous les chemins : à la mer, à la campagne, à la montagne, aucun endroit n'est épargné : beaux pâtés odorants, colombins parfaits, saucisses bien roulées, gros boudins bien gras, éclairs café ou chocolat, petits choux bien crémeux, chouquettes fourrées au royal canin…

    Ah, marcher sur une grosse merde de chien, s'en mettre plein les godasses !
S'allonger tranquille dans l'herbe et ne pas comprendre d'où vient cette odeur dégueu.
‒ Bé gros, c'est ce truc que tu as dans le dos, sur ta chemise !

   Le chien, comme le chat, chient partout, (le pire, ces malappris qui ne connaissent pas le papier toilette ultra confort triple épaisseur, ne se torchent même pas le cul) peut-on leur en vouloir ?

   Non, le chien et son ami le chat n'y sont pour rien. Par contre, je ferais bien tremper le nez dans la merde à leurs propriétaires défaillants.

Paris saucisse

Une alternative charcutière également bienvenue.

   "Larseneur (...) revenait du jardin en criant : - C'est le royaume de la crotte! Ce malheureux chien mange trop. (...) Un seul cabot, et le parc tout entier est franchement imprésentable. Il se multiplie, le chien et il a le génie de l'excrément. "

Georges Duhamel, Désert Bièvres,1937, p. 180.

30 septembre 2024

Alèir d'oc, Allier d'oïl

 


L'Allier en trait bleu

 Qu'est ce qui peut bien pousser le saumon et la saumone à frayer dans le Massif central ? 

19 septembre 2024

Bords de Loire

Gloria Friedmann
Le locataire

"Cette sculpture représente le vivant, l'homme assis sur la boule s'appelle le locataire. Un locataire doit laisser en bon état sa location en partant. (...) Essayons de faire la même chose avec cette planète."
Gloria Friedmann.

Chez les domestiques du Château

Vincent Bioulès - Fenêtre

Kôichi Kurita - Terres de Loire

Nymphéa tétragonal
(pas sûr à 100%,me dit Plantanet)
et sa grenouille

Azulejo égaré

01 août 2024

Comme un poisson dans l'eau

    Suite au doublé olympique historique hier soir sur 200 m papillon et 200 m brasse, mise à jour du tableau de vitesse de nage des poissons de Frank W. Lane, exprimée en kilomètre-heure.
    Le Chasseur Français N°642  d'août 1950. Page 469

Brème                 1,0 (une grosse feignasse ou une faute de frappe)
Épinoche               10,0

L'épinoche et ses 10 klms-heure pépère
Tanche            11,0
Anguille            12,0
Carpe 12,5 -  Muge 13,0 -  Vandoise 14,5 -  Gardon 16,0 - Perche 16,5 - Bar 19,0 -  Alose 32,0 - Brochet 33,0 -  Truite 37,0 - Saumon 40,0 - Thon 71,0 -  Espadon 97,0.

Encore plus fort : l'espadon voilier
Ce poisson peut  atteindre 110 km/h, soit 30 mètres par seconde

─ Mon prochain objectif : l'épinoche. Je n'en ferai qu'une bouchée !
nous a confié Léon Charmand.

29 avril 2024

Sors de ce corps !

Un complot ourdi dans les tréfonds de l'Inde védique, alimenté ensuite par la Grèce et repris par l'insoupçonnable Jean de La Fontaine :  la cigale revêtirait l'apparence d'une sauterelle.  Redonnons son véritable corps à la cigale et non son corps putatif, tout de fakes conçu.    

Jean-Henri Fabre nous alertait dès l'année 1897. Écoutons-le :

La fable de la cigale et la fourmi

La renommée se fait surtout avec des légendes ; le conte a le pas sur l'histoire dans le domaine de l'animal comme dans le domaine de l'homme. L'insecte, en particulier, s'il attire notre attention d'une manière ou de l'autre, a son lot de récits populaires dont le moindre souci est celui de la vérité.

Et, par exemple, qui ne connaît, au moins de nom, la Cigale ? Où trouver, dans le monde entomologique, une renommée pareille à la sienne ? Sa réputation de chanteuse passionnée, imprévoyante de l'avenir, a servi de thème à nos premiers exercices de mémoire. En de petits vers, aisément appris, on nous la montre fort dépourvue quand la bise est venue et courant crier famine chez la Fourmi, sa voisine. Mal accueillie, l'emprunteuse reçoit une réponse topique, cause principale du renom de la bête. Avec leur triviale malice, les deux courtes lignes :

Vous chantiez ! j'en suis fort aise.
Eh bien, dansez maintenant.

ont plus fait pour la célébrité de l'insecte que ses exploits de virtuosité. Cela pénètre comme un coin dans l'esprit infantile et n'en sort jamais plus.

Marguerite Calvet-Rogniat

La plupart ignorent le chant de la Cigale, cantonnée dans la région de l'olivier ; nous savons tous, grands et petits, sa déconvenue auprès de la Fourmi. A quoi tient donc la renommée ! Un récit de valeur fort contestable, où la morale est offensée tout autant que l'histoire naturelle, un conte de nourrice dont tout le mérite est d'être court, telle est la base d'une réputation qui dominera les ruines des âges tout aussi crânement que pourront le faire les bottes du Petit Poucet et la galette du Chaperon Rouge.

L'enfant est le conservateur par excellence. L'usage, les traditions deviennent indestructibles, une fois confiés aux archives de sa mémoire. Nous lui devons la célébrité de la Cigale, dont il a balbutié les infortunes en ses premiers essais de récitation. Avec lui se conserveront les grossiers non-sens qui font le tissu de la fable : la Cigale souffrira toujours de la faim quand viendront les froids, bien qu'il n'y ait plus de Cigales en hiver ; elle demandera toujours l'aumône de quelques grains de blé, nourriture incompatible avec son délicat suçoir ; en suppliante, elle fera la quête de mouches et de vermisseaux, elle qui ne mange jamais.

A qui revient la responsabilité de ces étranges erreurs ? La Fontaine, qui nous charme dans la plupart de ses fables par une exquise finesse d'observation, est ici bien mal inspiré. Il connaît à fond ses premiers sujets, le Renard, le Loup, le Chat, le Bouc, le Corbeau, le Rat, la Belette et tant d'autres, dont il nous raconte les faits et gestes avec une délicieuse précision de détails. Ce sont des personnages du pays, des voisins, des commensaux. Leur vie publique et privée se passe sous ses yeux ; mais la Cigale est une étrangère là où gambade Jeannot Lapin ; La Fontaine ne l'a jamais entendue, ne l'a jamais vue. Pour lui, la célèbre chanteuse est certainement une sauterelle.

Grandville, dont le crayon rivalise de fine malice avec le texte illustré, commet la même confusion. Dans son dessin, voici bien la Fourmi costumée en laborieuse ménagère. Sur le seuil de sa porte, à côté de gros sacs de blé, elle tourne dédaigneusement le dos à l'emprunteuse qui tend la patte, pardon, la main. Grand chapeau en cabriolet, guitare sous le bras, jupe collée aux mollets par la bise, tel est le second personnage, à effigie parfaite de sauterelle. Pas plus que La Fontaine, Grandville n'a soupçonné la vraie Cigale ; il a magnifiquement traduit l'erreur générale.

Jean-Jacques Grandville

D'ailleurs, dans sa maigre historiette, La Fontaine n'est que l'écho d'un autre fabuliste. La légende de la Cigale, si mal accueillie de la Fourmi, est vieille comme l'égoïsme, c'est-à-dire comme le monde. Les bambins d'Athènes, se rendant à l'école avec leur cabas en sparterie bourré de figues et d'olives, la marmottaient déjà comme leçon à réciter. Ils disaient : « En hiver, les Fourmis font sécher au soleil leurs provisions mouillées. Survient en suppliante une Cigale affamée. Elle demande quelques grains. Les avares amasseuses répondent : « Tu chantais en été, danse en hiver. » Avec un peu plus d'aridité, c'est exactement le thème de La Fontaine, contraire à toute saine notion.

La fable nous vient néanmoins de la Grèce, pays par excellence de l'olivier et de la Cigale. Ésope en est-il bien l'auteur, comme le veut la tradition ? C'est douteux. Peu importe après tout : le narrateur est Grec, il est compatriote de la Cigale, qu'il doit suffisamment connaître. Il n'y a pas dans mon village de paysan assez borné pour ignorer le défaut absolu des Cigales en hiver ; tout remueur de terre y connaît le premier état de l'insecte, la larve, que sa bêche exhume si souvent quand il faut, à l'approche des froids, chausser les oliviers ; il sait, l'ayant vu mille fois sur le bord des sentiers, comment en été cette larve sort de terre, par un puits rond, son ouvrage ; comment elle s'accroche à quelque brindille, se fend sur le dos, rejette sa dépouille, plus aride qu'un parchemin racorni, et donne la Cigale, d'un tendre vert d'herbe rapidement remplacé par le brun.

Le paysan de l'Attique n'était pas un sot, lui non plus ; il avait remarqué ce qui ne peut échapper au regard le moins observateur ; il savait ce que savent si bien mes rustiques voisins. Le lettré, quel qu'il soit, auteur de la fable, se trouvait dans les meilleures conditions pour être au courant de ces choses-là. D'où proviennent alors les erreurs de son récit ?

Moins excusable que La Fontaine, le fabuliste grec racontait la Cigale des livres, au lieu d'interroger la vraie Cigale, dont les cymbales résonnaient à ses côtés ; insoucieux du réel, il suivait la tradition. Il était lui-même l'écho d'un raconteur plus ancien ; il répétait quelque légende venue de l'Inde, la vénérable mère des civilisations. Sans savoir au juste le thème que le calam de l'Hindou avait confié à l'écriture pour montrer à quel péril conduit une vie sans prévoyance, il est à croire que la petite scène animale mise en jeu était plus rapprochée du vrai que ne l'est le colloque entre la Cigale et la Fourmi. L'Inde, grande amie-des bêtes, était incapable de pareille méprise. Tout semble le dire : le personnage principal de l'affabulation primitive n'était pas notre Cigale, mais bien quelque autre animal, un insecte si l'on veut, dont les moeurs concordaient convenablement avec le texte adopté.

Importé en Grèce, après avoir pendant de longs siècles fait réfléchir les sages et amusé les enfants sur les bords de l'Indus, l'antique conte, vieux peut-être comme le premier conseil d'économie d'un père de famille, et transmis avec plus ou moins de fidélité d'une mémoire à l'autre, dut se trouver altéré dans ses détails, comme le sont toutes les légendes, que le cours des âges accommode aux circonstances des temps et des lieux.

Le Grec, n'ayant pas dans ses campagnes l'insecte dont parlait l'Hindou, fit intervenir par à peu près la Cigale, de même qu'à Paris, la moderne Athènes, la Cigale est remplacée par la Sauterelle. Le mal était fait. Désormais indélébile, confiée qu'elle est à la mémoire de l'enfant, l'erreur prévaudra contre une vérité qui crève les yeux.

Le vrai visage de la cigale

Essayons de réhabiliter la chanteuse calomniée par la fable. C'est une importune voisine, je me hâte de le reconnaître. Tous les étés, elle vient s'établir par centaines devant ma porte, attirée qu'elle est par la verdure de deux grands platanes ; et là, du lever au coucher du soleil, elle me martèle de sa rauque symphonie. Avec cet étourdissant concert, la pensée est impossible ; l'idée tournoie, prise de vertige, incapable de se fixer. Si je n'ai pas profité des heures matinales, la journée est perdue.

Ah ! bête ensorcelée, plaie de ma demeure que je voudrais si paisible ; on dit que les Athéniens t'élevaient en cage pour jouir à l'aise de ton chant. Une passe encore, pendant la somnolence de la digestion ; mais des centaines, bruissant à la fois et vous tympanisant l'ouïe lorsque la réflexion se recueille, c'est un vrai supplice ! Tu fais valoir pour excuse tes droits, de première occupante. Avant mon arrivée, les deux platanes t'appartenaient sans réserve ; et c'est moi qui suis l'intrus sous leur ombrage. D'accord : mets néanmoins une sourdine à tes cymbales, modère tes arpèges, en faveur de ton historien.

La vérité rejette comme invention insensée ce que nous dit la fabuliste. Qu'il y ait parfois des relations entre la Cigale et la Fourmi, rien de plus certain ; seulement ces relations sont l'inverse de ce qu'on nous raconte. Elles ne viennent pas de l'initiative de la première, qui n'a jamais besoin du secours d'autrui pour vivre ; elles viennent de la seconde, rapace exploiteuse, accaparant dans ses greniers toute chose comestible. En aucun temps, la Cigale ne va crier famine aux portés des fourmilières, promettant loyalement de rendre intérêt et principal ; tout au contraire, c'est la Fourmi qui, pressée par la disette, implore la chanteuse. Que dis-je, implore ! Emprunter et rendre n'entrent pas dans les mœurs de la pillarde. Elle exploite la Cigale, effrontément la dévalise. Expliquons ce rapt, curieux point d'histoire non encore connu.

En juillet, aux heures étouffantes de l'après-midi, lorsque la plèbe insecte, exténuée de soif, erre cherchant en vain à se désaltérer sur les fleurs fanées, taries, la Cigale se rit de la disette générale. Avec son rostre, fine vrille, elle met en perce une pièce de sa cave inépuisable. Établie, toujours chantant, sur un rameau d'arbuste, elle fore l'écorce ferme et lisse que gonfle une sève mûrie par le soleil. Le suçoir avant plongé par le trou de bonde, délicieusement elle s'abreuve, immobile, recueillie, tout entière aux charmes du sirop et de la chanson.

Surveillons-la quelque temps. Nous assisterons peut-être à des misères inattendues. De nombreux assoiffés rôdent, en effet ; ils découvrent le puits que trahit un suintement sur la margelle. Ils accourent, d'abord avec quelque réserve, se bornant à lécher la liqueur extravasée. Je vois s'empresser autour de la piqûre melliflue des Guêpes, des Mouches, des Forficules, des Sphex, des Pompiles, des Cétoines, des Fourmis surtout.

Les plus petits, pour se rapprocher de la source, se glissent sous le ventre de la Cigale, qui, débonnaire, se hausse sur les pattes et laisse passage libre aux importuns ; les plus grands, trépignant d'impatience, cueillent vite une lippée, se retirent, vont faire un tour sur les rameaux voisins, puis reviennent, plus entreprenants. Les convoitises s'exacerbent ; les réservés de tantôt deviennent turbulents agresseurs, disposés à chasser de la source le puisatier qui l'a fait jaillir.

En ce coup de bandits, les plus opiniâtres sont les Fourmis. J'en ai vu mordiller la Cigale au bout des pattes ; j'en ai surpris lui tirant le bout de l'aile, lui grimpant sur le dos, lui chatouillant l'antenne. Une audacieuse s'est permis, sous mes yeux, de lui saisit le suçoir, s'efforçant de l'extraire.

Ainsi tracassé par ces nains et à bout de patience, le géant finit par abandonner le puits. Il fuit en lançant aux détrousseurs un jet de son urine. Qu'importe à la Fourmi cette expression de souverain mépris ! Son but est atteint. La voilà maîtresse de la source, trop tôt tarie quand ne fonctionne plus la pompe qui la faisait sourdre. C'est peu, mais c'est exquis. Autant de gagné pour attendre nouvelle lampée, acquise de la même manière dès que l'occasion s'en présentera.

On le voit : la réalité intervertit à fond les rôles imaginés par la fable. Le quémandeur sans délicatesse, ne reculant pas devant le rapt, c'est la Fourmi ; l'artisan industrieux, partageant volontiers avec qui souffre, c'est la Cigale. Encore un détail, et l'inversion des rôles s'accusera davantage. Après cinq à six semaines de liesse, long espace de temps, la chanteuse tombe du haut de l'arbre, épuisé par la vie. Le soleil dessèche, les pieds des passants écrasent le cadavre. Forban toujours en quête de butin, la Fourmi le rencontre. Elle dépèce la riche pièce, la dissèque, la cisaille, la réduit en miettes, qui vont grossir son amas de provisions. Il n'est pas rare de voir la Cigale agonisante, dont l'aile frémit encore dans la poussière, tiraillée, écartelée par une escouade d'équarrisseurs. Elle en est toute noire. Après ce trait de cannibalisme, la preuve est faite des vraies relations entre les deux insectes.

L'antiquité classique avait la Cigale en haute estime. Le Béranger hellène, Anacréon, lui consacre une ode où la louange est singulièrement exagérée. « Tu es presque semblable aux dieux », dit-il. Les raisons qu'il donne de cette apothéose ne sont pas des meilleures. Elles consistent en ces trois privilèges  : γηγενης, απαβης, αναςμοσαρχε  ( née de la terre, insensible à la douleur, chair dépourvue de sang ). N'allons pas reprocher au poète ces erreurs, alors de croyance générale et perpétuées bien longtemps après, jusqu'à ce que se soit ouvert l'oeil scrutateur de l'observation. D'ailleurs, en de petits vers où la mesure et l'harmonie font le principal mérite, on n'y regarde pas de si près.

Même de nos jours, les poètes provençaux, familiers avec la Cigale tout autant qu'Anacréon, ne sont guère soucieux du vrai en célébrant l'insecte qu'ils ont pris pour emblème. Un de mes amis, fervent observateur et réaliste scrupuleux, échappe à ce reproche. Il m'autorise à extraire de son portefeuille la pièce provençale suivante, où sont mis en relief, avec pleine rigueur scientifique, les rapports de la Cigale et de la Fourmi. Je lui laisse la responsabilité de ses images poétiques et de ses aperçus moraux, fleurs délicates étrangères à mon terrain de naturaliste ; mais j'affirme la véracité de son récit, conforme à ce que je vois tous les étés sur les lilas de mon jardin. J'accompagne son oeuvre d'une traduction, en bien des cas approximative, le français n'ayant pas toujours l'équivalent du terme provençal.

Souvenirs entomologiques, Jean-Henri Fabre, 1897, Vème Série, Chapitre 13.

Non, la cigale n'a rien à voir avec la sauterelle.

20 avril 2023

Faites-moi cygne

La constellation du Cygne

Calligramme décrivant la constellation du Cygne,  d'un manuscrit du IXe siècle : l'Aratea de Cicéron (c'est point carré), tiré de la traduction en latin du même Cicéron des Phaenomena du poète grec Aratos de Soles.

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Arque inter flexumar er cipar, mrhérique. Numque eftulertul fabrgmine caeli Mar parthuic opteft &uminis expert Sedmediocre 14cttiene corporelamen hee dextram cephetero pede pellerepmam Gethum vero clinico un guld cont forfequi propter pinn.tti corpor
CIGNUS QUILETOLOR FTORNING

    ou bien : 

Arque inter flexumes et ciput lir heri. Nim que eft il eft fabregmine caeli Mar parthune opraeft Numinis expert. Altinec purur ne Larr lucibus arder Sedmediocre 14cttient corpore lumen haec dextram cephe pede peller pumun Cefanum uero dinit angulu ment Forfequi propter pinn i corporir lum
CIGNUS QUIETOLOR FLORNIN).

par Google Lens (il ne devait pas avoir les lunettes propres)

16 janvier 2023

Ma petite bibliothéque

1 Bambi


Ce livre m'avait plu, beaucoup plu. Les pages en  étaient cartonnées et je trouvais ça du dernier chic. 
C'était mon premier livre, un cadeau de ma mamie Marthe.

Plus tard, en y réfléchissant, j'ai eu comme honte d'avoir possédé comme premier livre de cœur l'ouvrage d'un copieur fou (le dénommé Walt Disney) qui apposait sa signature sans vergogne sur des œuvres majeures du fonds européen, Bambi donc, Blanche-Neige, Pinocchio, Peter Pan.......

Mais j'avais été soulagé d'apprendre que Bambi (de l'italien bambino) était l'oeuvre de Felix Salten (de son vrai nom Siegmund Salzmann, né à Pest (à côté de Buda) en 1869, mort à Zurich en 1945 ) et avait paru en 1923 sous le titre :

Bambi, Eine Lebensgeschichte aus dem Walde
Bambi, l'histoire d'une vie dans les bois.

De plus sous son apparence de roman pour la jeunesse, Bambi devait être un sérieux brûlot car le livre fut interdit en 1936 par les autorités du régime nazi qui considéraient que son histoire était une allégorie du sort des Juifs d’Europe. La plupart des exemplaires existant à l'époque furent alors brûlés.

Ma conscience en fut apaisée.

Salten en priorité et non Disney

15 décembre 2022

L' œil d'Émile

Émile sur le point de quitter Médan à bicyclette

Denise et Jacques à bicyclette, sur une route bordée d’arbres

Promenade à vélo sur une route de campagne

Le remorqueur « Guêpe n°22 » tirant des péniches sur la Seine

Le loulou noir Pinpin sur une table de jardin, à l’entrée de l’allée de tilleuls

← ↑↑ Émile Zola photographe  ↑↑ →

20 novembre 2022

Chouette de Tengmalm


La Nyctale de Tengmalm
ou Chouette de Tengmalm (Aegolius funereus)
ou Chouette boréale


Aire de répartition de la nyctale de Tengmalm

01 novembre 2021

Dix bons points = une image

 

Certain Renard Gascon, d'autres disent Normand,
Mourant presque de faim, vit au haut d'une treille
Des raisins mûrs apparemment,
Et couverts d'une peau vermeille.
Le galant en eût fait volontiers un repas ;
Mais comme il n'y pouvait atteindre :
"Ils sont trop verts, dit-il, et bons pour des goujats. "
Fit-il pas mieux que de se plaindre ?

Le renard et les raisins
Fables de Jean de La Fontaine

Analyse de Wikipedia : Cette fable est la plus courte écrite par La Fontaine. Dans une perspective psychanalytique elle illustre le déni comme réaction aux frustrations douloureuses issues des conflits entre nécessité, besoin ou désir, et de l'incapacité à les satisfaire. Prise sous l'angle de la psychologie sociale elle illustre la réduction de la dissonance cognitive par le changement de locus de contrôle ; le renard finit par se convaincre qu'il ne mange pas les raisins non parce qu'ils sont hors de sa portée mais parce qu'ils sont trop verts.


Deux pèlerins trouvent une huître sur le rivage et entreprennent de se la disputer. Une querelle s'ensuit ; survient alors Perrin Dandin, institué juge. Il tient séance et rend son jugement : après avoir gobé l'huître, il accorde à chaque plaignant une écaille.


Un jour sur ses longs pieds, allait, je ne sais où,
Le Héron au long bec emmanché d’un long cou.
( Le héron attend d'avoir meilleur appétit puis dédaigne certains poissons. Il finira par devoir se contenter d'un limaçon.)


Le souriceau raconte à sa mère qu'il a rencontré un petit coq qui lui a fait très peur et un chat qu'il a trouvé fort sympathique.


Compère  le Renard se mit un jour en frais,
Et retint à dîner commère la Cigogne.
Ce brouet fut par lui servi sur une assiette :
La Cigogne au long bec n'en put attraper miette ;

...À quelque temps de là, la Cigogne le prie...
On servit, pour l'embarrasser,
En un vase à long col, et d'étroite embouchure.


Rien ne sert de courir ; il faut partir à point.


Petit poisson deviendra grand,
Pourvu que Dieu lui prête vie...
(Un carpillon tente de convaincre le pêcheur qui l'a capturé de le relâcher, en vain.)
...Un Tiens vaut, ce dit-on, mieux que deux Tu l'auras ;
L'un est sûr, l'autre ne l'est pas.


 Le renard et le bouc se promènent. Ils descendent dans un puits pour boire. Le renard propose au bouc de l'aider à sortir à l'aide de ses cornes. Le bouc ne se méfie pas et le renard, une fois sorti, laisse son comparse se débrouiller.
En toute chose il faut considérer la fin.


Perrette, sur sa tête ayant un Pot au lait
Comptait déjà dans sa pensée
Tout le prix de son lait, en employait l’argent ;...

...Le lait tombe ; adieu veau, vache, cochon, couvée.

Les Fables de La Fontaine
Illustrations de Marguerite Calvet-Rogniat 1897-1968